Entretien avec Axel Voss sur l’AI Act européen

Axel Voss est un homme politique allemand. Élu député européen en 2009, son travail parlementaire se concentre principalement sur les questions numériques et juridiques. Depuis 2019, il est membre de la commission des affaires juridiques et de la commission spéciale sur l’intelligence artificielle à l’ère numérique du Parlement européen (AIDA). À ce titre, il est shadow rapporteur du Parti populaire européen (PPE) pour le rapport d’initiative législative sur un régime de responsabilité civile pour l’intelligence artificielle (« AI Act »).

Propos recueillis par Bartolomé Lenoir.

Une Certaine Idée : De quelle façon le Parlement européen aborde-t-il le sujet de l’intelligence artificielle ?

Axel Voss : Le Parlement européen reconnait les bénéfices potentiels et les enjeux de l’intelligence artificielle et essaye d’élaborer un cadre global pour réguler son utilisation. Cependant, la majorité au Parlement européen a toujours une approche craintive de l’IA, centrée plus sur les risques que sur les bénéfices que l’IA peut apporter. Cette approche empêche de saisir toutes les opportunités qu’offrent les nouvelles technologies. J’aurais préféré une approche centrée sur la nécessité de localiser les industries des nouvelles technologies dans l’Union Européenne, mais, apparemment, l’heure n’est pas encore venue pour notre industrie de rattraper son retard.

UCI : Qu’est-ce que « l’Artificial intelligence Act » ? Quels défis faut-il relever pour protéger les européens ?

AV : L’Artificial intelligence Act vise à réguler l’utilisation et le développement de l’IA dans un cadre harmonisé au niveau européen garantissant des conditions de sûreté et de confiance. L’IA à haut risque, comme celle utilisée dans les infrastructures critiques, sera encadrée par des règles plus strictes. Plusieurs défis sont à relever, notamment celui de protéger les citoyens européens contre les dérives de pratiques telles que le « social score » mais aussi de lutter contre les préjugés sur l’intelligence artificielle. C’est la raison pour laquelle l’IA à haut risque doit fonctionner de façon transparente et claire pour tous.

UCI : Vous ne craignez pas que, en voulant contrôler l’intelligence artificielle en Europe, nous introduisions des distorsions de concurrence en favorisant ainsi les américains ? Ne risquons-nous, face au phénomène Google, d’être balayés par la vague et de se laisser distancer ?

AV : Mais nous sommes déjà à la traîne ! il y a un risque réel pour l’Europe de devenir une colonie de données des États-Unis et de la Chine ce qui aura des graves conséquences pour notre sécurité et notre compétitivité. C’est pourquoi nous devons non seulement nous focaliser sur le contrôle mais également laisser l’espace pour l’innovation. Je me bats pour cela.

UCI : Pourrait-on imaginer de créer une « IA européenne » justement pour contrôler tout le système ?

AV : L’objectif devrait être celui d’une « IA made in Europe » fondée sur des valeurs démocratiques. Si nous ne réussissons pas à réaliser cet objectif, une IA nuisible, mise au point par d’autres régimes politiques, deviendra l’IA dominante.

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